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Tout au long de l'année 2020, Bretagne Grands Migrateurs lance une chronique sur la truite de mer "Une année avec... la truite de mer !". Aujourd'hui, le huitième épisode : Résidente ou migratrice ? |
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La truite commune est une espèce à forte capacité adaptative. Elle regroupe trois formes écologiques : La truite de rivière (ou truite fario), la truite de mer et la truite de lac qui n’est pas présente dans les cours d’eau bretons et qui adopte, comme la truite de mer, une robe plus ou moins argentée.
Il n'existe pas de différence génétique entre les formes "marine", "rivière" et "lac" de la truite. Le caractère migratoire n'est que pour partie héritable, c'est-à-dire que la truite a la capacité de développer une forme biologique à partir d'une autre. Cette hérédité partielle est toutefois plus élevée lorsque ces parents sont truites de mer. Des études récentes suggèrent des différences dans l'expression des gènes influençant le cycle biologique des deux phénotypes de la truite. Il a été constaté que les truites migrantes et résidentes de la même zone présentaient des profils d'expression génique différents, tandis que des populations géographiquement éloignées avec la même histoire de vie présentaient une expression génique similaire. Ainsi, l'expression des gènes semble être influencée par l'environnement et les interactions entre les gènes et l'environnement qui déterminent le cycle biologique et les décisions de migration. Les liens sont forts entre les formes "rivière" et "marine", les interactions biologiques jouant sur les stratégies de recrutement et les stratégies d’histoire de vie des truites. En effet, il n’existe pas, dans les cours d'eau côtiers, deux tactiques de vie distinctes chez la truite mais un continuum s'exprimant à la fois dans le temps (âge de maturation, espérance de vie) et dans l'espace (distance de migration). Ces tactiques, différentes selon le sexe et l'année, sont sous le contrôle du taux de croissance aux stades juvéniles. Le ralentissement de la croissance ou une diminution du « surplus d’énergie allouable à la croissance » (à cause d’une limitation de la nourriture disponible ou accessible par exemple) pousserait les jeunes à partir en mer.
Représentation schématique des stratégies d’histoires de vie de la truite et de certaines des principales menaces affectant son abondance (© Bengt Finstad and Kari Sivertsen, NINA) La décision de migrer chez un individu est un compromis entre les avantages et les coûts dans l’objectif de :
La croissance est généralement plus élevée en mer qu'en eau douce. La migration alimentaire est une alternative viable si les habitats éloignés offrent de meilleures opportunités de croissance sans diminution disproportionnée de la survie. Mais pour que l'anadromie soit une tactique viable du cycle biologique, le taux de croissance des poissons anadromes doit être plus élevé que celui des résidents d'eau douce correspondants.
Lors de la migration marine, la mortalité est plus élevée qu'en eau douce, la truite de mer étant confrontée à des taux de prédation élevés au début de la migration maritime lorsqu'elle est petite et traverse la zone estuarienne. Mais en migrant, la truite de mer peut éviter des conditions environnementales défavorables dans le cours d'eau d'origine (sécheresse, …).
Avec une taille corporelle plus grande, la truite de mer augmente la production de gamètes et la capacité concurrentielle directe sur la frayère, et ainsi obtenir un succès reproducteur accru. La taille des œufs augmente avec la taille de la mère, et avec l'augmentation de la taille des œufs, la croissance précoce et la viabilité de la progéniture augmentent. Toutefois, lorsque le taux d’oxygène est faible et/ou qu’il y a colmatage, les gros œufs sont défavorisés en raison d’un rapport surface/volume défavorable. Un autre avantage pour la progéniture des femelles anadromes peut provenir d'une date d'éclosion plus précoce dans la saison, comme cela a été rapporté chez la truite commune anadrome. L’hiver et le début du printemps semblent être une période critique au cours de laquelle la décision est prise quant à l'opportunité de migrer vers une meilleure zone d'alimentation. Les facteurs environnementaux influençant la croissance au début de la vie sont probablement les principaux indices sur lesquels la décision est prise :
Le milieu marin agit quant à lui comme un filtre sélectif sur l'anadromie, et toute augmentation de la mortalité en mer et de la croissance est susceptible de contribuer à la réduction de l'abondance de la truite de mer dans l'espace et dans le temps. Ainsi en quelques générations seulement, des conditions environnementales modifiées peuvent mettre fin à la tendance à migrer. De même, l’habitat de reproduction influence la détermination de la fréquence, de l'abondance et du sex-ratio de la truite anadrome (accessibilité au site de frai, qualité de l’habitat, conditions hydrologiques et thermiques, …). Mais l’Homme joue également un rôle majeur. Changement climatique, pêcheries, aquaculture, dégradation de la qualité des habitats, développement côtier… sont autant de menaces qui aujourd’hui participent aux changements d’équilibre entre les formes « résidentes » et migratrices voire au déclin des populations de truites de mer dans certaines régions… Article issu de la publication : Nevoux M, Finstad B, Davidsen JG, et al. Environmental influences of life history strategies in partial anadromous brown trout (Salmo trutta, Salmonidae). Fish Fish. 2019;00:1–32. https://doi.org/10.1111/faf.12396 Un grand merci à Marie Nevoux pour la relecture.
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… Prochain épisode fin octobre |
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