Les deux espèces d'aloses s'étendaient originellement sur toutes les côtes Atlantiques de la Norvège au Maroc. La répartition est aujourd'hui très réduite du fait des activités anthropiques. Les aloses ont en effet complètement disparu de certains fleuves en particulier du fait de la construction de barrages. D'autres impacts de l'activité humaine ont conduit à la raréfaction de ces espèces : dégradation de la qualité de l'eau et extraction de granulats. L'aire de répartition de la grande alose s'est d'ailleurs beaucoup plus réduite que celle de l'alose feinte. Au Nord, l'Elbe, le Rhin, la Meuse et la Seine semblent désertés par la grande alose. De même, au Sud, l'espèce est éteinte sur les fleuves marocains du Sud. | Répartition des aloses en Europe (Source : Sabatié, 2011) |
En France, présente sur tous les grands fleuves au XVIIIème siècle, sa répartition a fortement diminué au cours des XIXème et XXème siècles. On la trouve aujourd’hui dans les bassins de la Gironde, la Loire, l’Adour, la Charente et la Nivelle et quelques cours d’eau côtiers de la Manche et de l’Atlantique. Le retour de l’alose a été récemment constaté sur la Seine. Lle linéaire colonisé par la grande alose représente 3760 km. Sur l’ensemble des fronts de colonisation expertisés pour la grande alose, 26,5% des limites ont un indice de confiance faible quant à leur positionnement, 47% un indice de confiance moyen, et 26,5% un indice fort. Le linéaire colonisé par l'alose feinte représente 1906 km.
Linéaire colonisé par la grande alose en France métropolitaine (Source : INRA-AFB, 2018) | Linéaire colonisé par l'alose feinte en France métropolitaine (Source : INRA-AFB, 2018) |
En Bretagne, son aire de répartition se limitent principalement aux grands fleuves côtiers avec des fluctuations importantes du stock d’une année sur l’autre. Ceci dit les aloses fréquentaient historiquement peu les cours d'eau bretons. Ce n’est qu’à compter des années 80 que des remontées de grandes aloses sont observées, en premier lieu sur la Vilaine et l'Aulne. A la faveur d’une possible augmentation de la température de l’eau et d’une distribution marine plus nordique de l’espèce, sa présence s’est renforcée en Bretagne depuis deux décennies à partir de la dispersion d’individus originaires de la Loire voire de la Gironde. Cette espèce est ainsi observée sur la partie aval de plusieurs cours d’eau côtiers : le Couesnon, la Rance, l’Arguenon, le Gouessant, le Gouët, le Trieux, le Leff, le Jaudy, le Léguer, le Penzé, l’Elorn, l’Aulne, le Goyen, l’Odet, le Scorff, le Blavet et l’Auray. Elle remonte la Vilaine jusqu’au barrage de Malon à Guipry (indice de confiance fort pour cette limite) où, malgré des expériences d’abaissement du clapet, les conditions de franchissement ne sont pas satisfaisantes pour les aloses. Elle est également retrouvée sur l’Oust qui est le principal affluent de la Vilaine ainsi que sur l’Aff.
Si en Bretagne historiquement l’alose feinte aurait été observée sur l’Aulne et la Vilaine, sa présence n’y est aujourd’hui pas certaine.
Les capacités de franchissement d’un obstacle sont étroitement liées aux capacités de nage et de saut qui dépendent elles-mêmes de la morphologie de l’espèce, de sa taille et de la température de l’eau.
Bien que réputées bonnes nageuses, les aloses possèdent des capacités de nage réduites et n’ont pas d’aptitude au saut : des vitesses de l’ordre de 2m/s constituent une difficulté majeure dès lors que la distance à franchir dépasse une dizaine de mètres, des vitesses de l’ordre de 3,5 à 4m/s sur quelques mètres une barrière difficilement franchissable. Face à un obstacle, l’alose recherche les veines d’eau régulières à écoulement laminaire. A l’inverse, elle semble éviter les zones tourbillonnaires à forte turbulence et les eaux émulsionnées (remous à l’aval de la chute, ressaut, …).
Les obstacles à la migration anadrome des aloses restreignent l’accès aux zones naturelles de reproduction et/ou induisent des retards à la migration allant jusqu’à compromettre leur reproduction. La modification du flux de migration provient d’un changement de comportement des aloses face à l’ouvrage se traduisant par un regroupement des poissons dans une zone de repli constituée par un profond situé en aval de l’obstacle où les poissons bloqués attendent d’avoir les conditions nécessaires à son franchissement. Si les conditions de franchissabilité ne s’améliorent pas ou si les aloses échouent durant plusieurs jours, elles peuvent alors frayer sous l’obstacle, dans des conditions environnementales potentiellement contraires à la survie des œufs.
Restaurer et garantir la migration des saumons vers leurs zones de reproduction participent à leur maintien. Plusieurs solutions existent pour réduire voire annuler l’impact négatif des obstacles à leur remontée, allant de l’effacement de l’ouvrage pour un gain écologique maximal à la passe à poissons, solution partielle, qui ne permet pas le franchissement de 100% des poissons (efficacité d’une passe à poissons de 50% est une valeur excellente pour les aloses et une valeur de 10 à 20% est fréquente) ni le passage des sédiments. |